Tu étais là, planté devant cet écran de télévision, revivant la scène encore et encore sans comprendre ce qui était en train de se passer. Toi, garçon de seize ans, tu ne comprenais pas comment, en un instant, tout avait changé. Tu avais, d'un seul coup, perdu tous tes repères et tandis que tu attendais avec la petite demoiselle tout contre toi, tu repris le fil de ta vie. Toi, tu n'étais rien ou du moins, tu n'avais jamais été grand-chose. Tu étais comme tant d'adolescent à ton âge, des rêves et des envies plein la tête. Tu n'avais pas vraiment quelque chose dont tu devais te plaindre, du moins, jusqu'à aujourd'hui. On t'avait toujours bien élevé, tu avais des parents aimants s'occupant de toi, même si leur travail les empêchait d'être tout le temps d'être à vos côtés mais tu le comprenais. Tu vivais ta vie comme beaucoup d'autres, tu n'étais pas le plus populaire de ton école, tu étais même un peu geek sans pourtant l'être totalement. Tu faisais partie de cette catégorie de personnes qui appréciaient se retrouver sur un ordinateur tout en ayant une vie sociale et en faisant du sport. Tu étais différent des autres par ta propre personnalité mais tu ressemblais à un ensemble. Tu ne cherchais pas à sortir des sentiers battus par une vie de débauche ou en imposant tes idées à autrui. Tu étais un élève dans la moyenne mais cela suffisait amplement. Une vie simple, voilà ce qui t'attendait, tu n'aspirais pas à d'immense choses et même si parfois tu laissais percevoir ton foutu caractère. Tout cela, tout venait d'être balayé en un seul instant par cette nouvelle à laquelle tu ne t'attendais nullement. La petite fillette de neuf ans, te regardait, avec ses yeux pleins de larme et tu n'aimais nullement cela. La serrant tout contre ton coeur, elle avait calmement passé ses bras autour de ton cou. Elle était terrorisée et même si tu l'étais autant qu'elle, tu n'en montrais rien, tu restais fort pour ce petit bout de chou que tu te devais de protéger. « Je pourrais utiliser mes pouvoirs pour qu'il revienne. » Son innocence réchauffait ton coeur, te faisait comprendre que même durant les heures les plus noires, il y avait une raison de se battre, d'aller de l'avant, d'oublier le passer pour chercher un avenir. « C'est impossible ma chérie, on ne peut pas ramener les gens du paradis mais tout ira bien, je te le promets. » Cette promesse n'était nullement de celle que tu faisais en l'air, tu allais t'y tenir, pour le meilleur comme pour le pire, tu serais là pour elle, encore plus que tu ne l'avais jamais été, elle était ta dernière famille. Continuant de garder les yeux rivés sur l'écran de télévision, tu voyais l'avion ou plutôt les débris qui en restaient. Oui, un accident malheureux, quelque chose de rare et qui pourtant était arrivé. Bien entendu, on vous avait pris en cherche, cherchant quelqu'un qui serait capable de devenir votre tuteur. Non, tes parents n'avaient rien laissé sur ce point, ils ne pensaient pas partir de sitôt et qui auraient pu leur en vouloir. Tu savais simplement que les choses ne seraient pas aisées, pas tellement pour toi mais surtout pour ta soeur. Tu savais que sa particularité ne rendait pas aisé sa nouvelle affectation. Comment expliquer à une autre personne qu'elle était sorcière, que dans quelques années, elle irait dans une drôle d'école avec des gens comme elle. Comment faire comprendre à quelqu'un qu'un autre monde vit, non loin de nous, un monde inaccessible et étranger. Oui, les choses n'allaient pas être faciles, la perte de deux êtres chers peut entrainer beaucoup de souffrance mais aussi des conséquences qu'on ne verrait nullement en temps normal. La protéger restait donc ton objectif numéro un, celui pour lequel tu allais te battre.

Il y avait une époque où pour ses beaux yeux tu aurais fait n'importe quoi, mais maintenant, tandis qu'elle se présentait devant toi, tu ne ressentais plus rien pour elle. Non, tout amour pour cette femme avait disparu, à l'instant même où elle t'avait appris la triste nouvelle. Non, vous n'étiez plus deux faces d'une même pièce. Vous vous étiez éloigné, tu avais laissé tomber des études de marketing pour te lancer dans l'infographie et tu avais maintenant une place chez une grande maison de production. Ton but serait d'un jour monter la tienne. Elle ne comprenait pas ce qui te plaisait là dedans, ni même le fait que tu étais aussi bien payé qu'elle alors qu'elle trimait bien plus. Oui, tu étais chez vous avec votre fille de laquelle elle était jalouse. Au fond, c'était quelque peu logique. On pouvait voir dans ton regard que tu n'avais d'yeux que pour ton ange et que sans ce dernier vous ne seriez plus ensemble. Oui, elle avait été ton amour de jeunesse, celui que l'on découvre à l'université, qu'on aime et puis que l'on quitte quand les voies deviennent différentes. C'était surement pour cela que tu ne l'avais jamais demandée en mariage, parce que tu ne l'aimais pas tant que ça et qu'à la fin vos relations n'étaient plus que cris et larmes. Elle faisait ressortir le pire de ta personne et tu la détestais pour cela. Non, tout amour avait disparu de vos vies, il ne restait plus que Angie, c'était elle qui occupait tes jours et tes nuits, c'est sur elle que tu veillais. C'était maintenant elle qui avait l'ascendant sur ton coeur. Tu étais ce genre de papa poule capable de passer des heures, le baby phone à l'oreille pour t'assurer qu'elle ne pleurait pas. « Je demande la garde exclusive d'Angie. » Elle te l'avait dit et répété, elle te ferait payé ce manque d'amour, le fait que tu la délaissais. Elle avait trouvé sa meilleure arme en te privant de ta fille.Oui, elle avait frappé là où ça faisait extrêmement mal et tu ne savais nullement comment réagir. Le combat était quelque peu perdu d'avance. Elle avait la place que tout le monde voulait, elle pourrait s'occuper d'Angie, elle était sa mère. Tu savais que dans bons nombres de situation équivalente, la mère s'en sortait toujours avec l'enfant. Le pire c'est qu'elle ne désirait pas vraiment, elle voulait simplement te briser comme elle l'avait promis. Non, elle n'avait pas accepté ta façon d'agir et maintenant tu allais le payer au prix fort, sans pouvoir te défendre. Tu avais bien demandé une garde partagée, fait valoir que ton travail te permettait de rester à la maison mais rien n'y faisait. Marnie était une excellente comédienne, elle t'accusait de manquer d'amour, de ne pas être assez stable pour élever un enfant. Elle remettait sur la table tous tes défauts et oubliait toutes les qualités qu'elle avait tellement appréciées chez toi, auparavant. Toi, tu la suppliais du regard de revenir en arrière, de ne pas faire subir à votre fille vos histoires sans queue ni tête mais elle ne le désirait nullement. Vous étiez trop différents et rien ne pourrait arranger cela. « J'accorde à Madame Huxley la garde exclusive d'Angie et un droit de visite pour monsieur Rowley. Ce dernier pourra se faire sans la présence de Madame Huxley. » Ton coeur se mourrait et elle jubilait, les choses n'allaient pas se passer comme ça, tu allais faire appel, obtenir plus. Tu ne laisserais pas tomber ta petite princesse. Oh oui, Marnie allait payer pour tout ce qu'elle venait de faire. Tu ne savais pas encore comment mais un jour, ton ange serait avec toi, dans ta belle maison, vous serez heureux, sans elle.

Tu revoyais les images défilées en boucle dans ton esprit. La télé montre parfois des choses horribles et c'était le cas aujourd'hui. L'organisation ou plutôt l'un de ses chasseurs avait encore frappé et un corps avait été brulé. Cela te donnait envie de vomir et t'amenait en même temps à te sentir horriblement mal. Tu avais peur, pour ta soeur. Oui, contrairement à toi, elle risquait à tout instant de se faire avoir par l'un de ses fous. Pour t'assurer de sa sécurité, tu l'avais même contrainte à venir vivre avec toi. Oui, dans ton esprit, c'était la première étape pour protéger le semblant de famille qui te restait jusque-là. « Arrêtes de regarder ces horreurs, va t'amuser un peu. » Tu lui souriais remarquant derrière son attitude insouciante qu'elle était quelque peu paniquée. Tu la comprenais, tu savais qu'elle voulait faire sa vie comme une sorcière, comme ce qu'elle était mais qu'elle ne pouvait plus. Tu lui interdisais d'ailleurs de faire de la magie dans les environs et même partout. Oui, tu voulais qu'elle paraisse aussi normal que possible afin de t'assurer de sa survie. La nuit, tu étais souvent réveillé par ces horribles cauchemars dans lesquels tu rêvais qu'on l'attrapait et qu'on la faisait bruler devant ton pauvre regard. Te levant du fauteuil où tu te trouvais, tu t'approchas d'un des tiroirs où se trouvait ce que tu devais lui donner. Tu avais passé des jours à faire ces faux-papiers. Oui, tu avais surement, pour elle, enfreint plus d'une loi mais cela n'avait vraiment aucune importance. « J'ai fait ça pour toi, tu dois fuir, aller ailleurs, un endroit où les sorciers ne seront pas pourchassés. Tu peux refaire ta vie, je suis la dernière personne en vie qui connait ton secret, personne ne te courra après. » Elle te regardait avec un mélange étrange d'admiration et de colère. Elle n'appréciait surement pas ce côté un peu trop protecteur mais tu ne pouvais pas te permettre d'agir différemment, tu avais promis de la protéger et tu ferais cela contre vent et marée. « Selwyn, je ne fuirais pas, je ne serais pas l'une de ses personnes qui s'enfuyaient et je ne suis pas en danger. Personne ne sait qui je suis, personne n'a un ami ou un membre de sa famille qui pourrait le trahir mais certaines personnes pourraient se retrouver dans ce cas. » Tu écoutais ce qu'elle était en train de te dire tout en voyant une lueur de peur dans ses yeux. Oui, elle se trouvait encore dans une bonne situation ce qui ne serait certainement pas le cas de tout le monde. « Imagine qu'Angie soit une sorcière, imagine que sa mère le sache et qu'elle décide de la dénoncer. » Cela te déchirait le coeur, rien que d'imaginer cette possibilité cela te donnait envie de vomir. Tu n'avais toujours pas la garde de ta fille et tu savais que dans de telles circonstances, ton ex serait capable d'agir de la sorte, tu savais qu'elle était sans aucune limite et que cela ne changerait malheureusement jamais. « Où veux-tu en venir ? » Tu savais qu'elle avait une idée derrière la tête, elle était toujours ainsi lorsque c'était le cas et rien ne pourrait te faire changer d'avis là-dessus. « Tu sais, on a une grande maison, pas mal de pièces et tu es très doué pour créer de nouvelles identités. On pourrait aider pas mal de monde Selwie, on pourrait le faire. » Tu ne savais pas quoi en penser, l'idée était folle voir pire que cela mais au fond, est-ce que cela te dérangeait-il vraiment ? Est-ce qu'on fond de toi, cette idée ne te paraissait telle qu'elle devrait être un moyen d'aider les autres, de faire quelque chose de bien, d'agir de la bonne manière, tout simplement. « Il faudra acheter du matériel, trouver des astuces, mettre le tout en place mais on pourrait y arriver. Oui, tu ne désirais pas voir d'autres sorcières ou sorciers brulés sur des bûchers. Non, tu défendais la paix comme tu le ferais toujours.